Déontologie de l’élu local

Les normes de comportement que les élus doivent adopter dans lexercice de leurs fonctions sont formalisées sous la forme dune charte de l’élu local fixée par le législateur. Ce document récapitule les principes fondamentaux (obligations dimpartialité, de diligence, dignité, probité et intégrité) et prescrit des règles de comportement dans certaines situations problématiques, comme par exemple en cas de conflit dintérêts.

À ces principes s’ajoutent des interdictions d’atteintes à ladministration publique et à la confiance publique, ou de fautes non intentionnelles commises dans l’exercice d’une mission de service public.

Des infractions financières sont contrôlées par les juridictions financières qui, par ailleurs, émettent des observations publiques mettant en cause la régularité, l’équilibre et la transparence de la gestion des collectivités territoriales.

Des obligations doivent aussi être respectées concernant la communication des  collectivités territoriales et des candidats en  période électorale ainsi que pour le financement des  campagnes électorales.

L’ensemble de ces normes, interdictions et obligations constituent autant de sources de la déontologie des élus locaux, en général, et des exécutifs territoriaux, en particulier.

Le terme « déontologie » a été introduit par Jeremy Bentham, dans un ouvrage publié en 1834. Il combine les mots grecs : deon (ce qui est convenable) et logos (science ou discours) qui, littéralement, fixe les normes d’un comportement responsable.

Dans le champ de laction publique, la déontologie désigne les principes obligatoires qui guident les acteurs publics (les élus tout comme les fonctionnaires) dans lexercice de leurs responsabilités, c’est-à-dire, leurs mandats ou leurs activités professionnelles.

La déontologie se distingue de l’éthique, cette dernière étant une notion plus générale, fondée sur des convictions personnelles quant à la juste manière de vivre, et sur des actes inspirés par une certaine conception de la sagesse humaine .

Le risque déontologique émerge lorsque les actes d’un acteur public contreviennent aux principes obligatoires et menacent la réputation de son institution et/ou de sa propre personne avec des conséquences possibles en matière disciplinaire, pénale ou financière.

Pour prévenir ces risques, il est crucial d’identifier clairement les principes déontologiques en jeu et comprendre les infractions potentielles.

Obligations tirées de la charte des élus locaux

Les normes de comportement que les élus doivent adopter dans lexercice de leurs fonctions – et que les citoyens sont en droit dattendre de la part de leurs représentants – sont formalisées sous la forme dune charte de l’élu local fixée par le législateur . Ce document récapitule les principes fondamentaux (obligations dimpartialité, de diligence, dignité, probité et intégrité) et prescrit des règles de comportement dans certaines situations problématiques, comme par exemple en cas de conflit dintérêts.

Lors de la première réunion de chaque assemblée territoriale, immédiatement après l’élection de l’exécutif, le président ou le maire donnent lecture de cette charte de l’élu local.

Les obligations de la charte des élus locaux

L’exemplarité

L’élu local exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité.

La poursuite du seul intérêt général

Dans l’exercice de son mandat, l’élu local poursuit le seul intérêt général, à l’exclusion de tout intérêt qui lui soit personnel, directement ou indirectement, ou de tout autre intérêt particulier.

La prévention des conflits d’intérêts

L’élu local veille à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts. Lorsque ses intérêts personnels sont en cause dans les affaires soumises à l’organe délibérant dont il est membre, l’élu local s’engage à les faire connaître avant le débat et le vote.

L’absence de détournement de biens publics

L’élu local s’engage à ne pas utiliser les ressources et les moyens mis à sa disposition pour l’exercice de son mandat ou de ses fonctions à d’autres fins.

Le désintéressement

Dans l’exercice de ses fonctions, l’élu local s’abstient de prendre des mesures lui accordant un avantage personnel ou professionnel futur après la cessation de son mandat et de ses fonctions.

L’assiduité

L’élu local participe avec assiduité aux réunions de l’organe délibérant et des instances au sein desquelles il a été désigné.

De plus, certaines catégories d’élus locaux sont tenues de souscrire une déclaration dintérêts et dactivités ainsi qu’une déclaration de patrimoine, tout comme d’autres catégories de responsables publics et les parlementaires.

Le non-respect de ces obligations peut donner lieu à des suites d’ordre disciplinaires si celles-ci sont prévues dans le règlement intérieur de l’assemblée. En cas de situations présumées constitutives d’infraction ou de délit, un signalement peut être fait au titre de l’article 40 du code de procédures pénales qui peut déboucher sur des poursuites du Parquet contre l’auteur des manquements.

Interdictions d’atteintes à ladministration publique et à la confiance publique 

Un certain nombre de responsabilités pénales pèsent sur tout élu local ou fonctionnaire territorial en tant que personne physique, ainsi que sur toute collectivité territoriale en tant que personne morale, tirées dinfractions pénales particulières à ladministration publique.

Les risques de mise en cause de la responsabilité pénale des fonctionnaires territoriaux obéissent aux principes du droit pénal et plus particulièrement les suivants :

        • le juge pénal ne se soucie pas de savoir sil y a faute personnelle ou faute de service. Il regarde si le dommage causé à la victime résulte dune infraction, prévue par une loi (ou un règlement pour les contraventions), et commise par le fonctionnaire et/ou son autorité territoriale ;
        • appliquant le principe juridique de personnalisation des peines, le juge examine si l’élu local ou le fonctionnaire en tant quindividu ont commis un fait punissable. Il juge en fonction de la personne, de ses antécédents et de multiples considérations qui lui sont liées. De même, le principe de personnalité des peines fait obstacle à ce que ladministration paye les amendes auxquelles l’élu ou le fonctionnaire peuvent être condamnés, même en cas de faute de service ;
        • linstruction pénale détermine lexistence ou non des quatre éléments constitutifs dune infraction : le fondement légal de linfraction ; la commission dun fait pénalement répréhensible ; labsence de fait justificatif comme la légitime défense ; lintention de commettre la faute pénale, ou, pour le moins, une imprudence, une négligence ou un manquement caractérisé, une mise en danger délibérée de la vie dautrui.

Les atteintes à ladministration publique et à la confiance publique commises par des personnes exerçant une fonction publique englobent les champs suivants :

Les interdictions pénales pour les élus et les agents locaux

Les atteintes à la confiance publique : faux et usages de faux

Les atteintes à l’administration publique : abus d’autorité dirigés contre l’administration ; abus d’autorité dirigés contre les particuliers ; manquements aux devoirs de probité

Les atteintes involontaires à la vie de la personne, mise en danger et non assistance à personne en danger : homicide involontaire ; atteintes involontaires à l’intégrité de la personne ; mise en danger d’autrui ; Délaissement d’une personne hors d’état de se protéger ; entrave aux mesures d’assistance et omission de porter secours ; non-assistance à personne en péril et secret professionnel

Les conflits d’intérêts et la prise illégale d’intérêts

Les atteintes aux droits de la personne résultant des fichiers ou des traitements informatiques

Le recel d’abus de bien social

De plus, des responsabilités pénales et des devoirs tirés de chartes particulières sont à prendre en compte pour les collectivités territoriales qui gèrent des établissements sociaux et médico-sociaux :

L’atteinte au secret professionnel

Article 26 de la loi du 13 juillet 1983

Article 226-13 du code pénal

Le délaissement d’une personne hors d’état de se protéger

Articles 223-3, 223-4, 227-1 et 227-2 du code pénal

La non assistance à personne en péril

Article 223-6 du code pénal

Charte des droits et libertés de la personne accueillie

article L. 311-4 du Code de l’action sociale et des familles

Charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante

Élaborée en 1987 et actualisée en 2007 par la Fondation nationale de gérontologie et le ministère des Affaires sociales, la charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante a pour objectif de reconnaître la dignité des personnes âgées en perte d’autonomie et à préserver leurs droits.


Délits pour fautes non intentionnelles commises dans l’exercice d’une mission de service public

Le fondement de la faute non intentionnelle réside dans le principe de droit pénal selon lequel il ny a pas de crime ou de délit sans intention de le commettre. Toutefois, lorsque la loi le prévoit et dans certaines situations, le délit peut être constitué en labsence de faute intentionnelle :

        • cest le cas dans les situations de mise en danger délibérée de la personne dautrui ;
        • de même, en cas de faute dimprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, sil est établi que lauteur des faits na pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.

Dans ces cas, les personnes physiques qui nont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui nont pas pris les mesures permettant de l’éviter sont responsables pénalement sil est établi quelles ont soit :

        • violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ;
        • commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque dune particulière gravité quelles ne pouvaient ignorer.

Le Code pénal pose toutefois le principe selon lequel il ny a pas de contravention en cas de force majeure.

Les fonctionnaires et les agents non titulaires de droit public peuvent être condamnés pour des fautes non intentionnelles commises dans lexercice de leurs fonctions, sil est établi quils nont pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi leur confie.

Ce principe est étendu aux élus. Les atteintes involontaires à la vie donnent lieu à des sanctions distinctes selon le rôle de leurs auteurs, direct ou indirect dans le dommage.

Auteurs directs du dommage

Ils seront condamnés si le juge estime quils ont commis une faute dimprudence ou de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou les règlements. En ce cas, le juge examine la nature des missions, des fonctions, des compétences, du pouvoir et des moyens dont disposait lauteur des faits pour apprécier sil a accompli les diligences normales, cest-à-dire sil a pris les mesures que ces fonctions, compétences et pouvoirs lui commandaient de prendre, notamment en matière de sécurité.

Auteurs indirects du dommage

Ceux qui nont pas causé directement le dommage, mais qui ont contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui nont pas pris les mesures permettant de l’éviter (par exemple, le maire de la commune ou le directeur général des services), seront condamnés sil est établi quils ont soit :

        • violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ;
        • commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque dune particulière gravité quils ne pouvaient ignorer.

Par ailleurs, le juge peut, dans ces situations, déclarer civilement responsable lauteur indirect, sans le condamner pénalement, et donc permettre que la victime soit indemnisée.

Ces principes sappliquent pour les infractions suivantes : lhomicide involontaire, les atteintes involontaires à lintégrité de la personne, la mise en danger dautrui, le délaissement dune personne hors d’état de se protéger, lentrave aux mesures dassistance, lomission de porter secours.

Catégories dinfractions pour fautes non intentionnelle

Homicide involontaire

Le fait de causer la mort d’autrui, dans les conditions et selon les distinctions propres aux fautes non intentionnelles, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

Atteintes involontaires à lintégrité de la personne

Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions propres aux fautes non intentionnelles, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois.

Mise en danger d’autrui

Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

Délaissement d’une personne hors d’état de se protéger

Actes de délaissement en un lieu quelconque d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou mental.

Entrave aux mesures d’assistance et omission de porter secours

Diverses formes d’entrave aux mesures d’assistance et d’omission de porter secours sont sanctionnées :

        • le fait d’entraver volontairement l’arrivée de secours destinés à faire échapper une personne à un péril imminent ou à combattre un sinistre présentant un danger pour la sécurité des personnes ;
        • quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle de la personne s’abstient volontairement de le faire ;
        • sera également puni quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ;
        • quiconque s’abstient volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes.

Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement pour ce type de délit d’entrave aux mesures d’assistance et d’omission de porter secours.

 

Observations et infractions dans la gestion financière des collectivités territoriales

L’examen de gestion réalisé par les CRTC peut détecter d’éventuels risques de gestion dans les collectivités territoriales. Par ailleurs, les ordonnateurs portent une responsabilité financière susceptible d’entraîner diverses infractions, telles que définies par le code des juridictions financières.

Portée de l’examen de gestion

Les chambres régionales des comptes (CRC), à travers lexamen de la gestion des collectivités territoriales, garantissent le respect des principes fondamentaux de laction publique . Elles évaluent les modalités d’exercice des responsabilités des collectivités territoriales et de leurs dirigeants et formulent des recommandations tirées de ces examens de gestion.

Rappelons que lexamen de gestion est défini comme un dispositif de contrôle portant sur :

        • la régularité des actes de gestion ;
        • l’économie des moyens mis en œuvre ;
        • l’évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par lassemblée délibérante ou par lorgane délibérant. Ces derniers ne peuvent, quant à eux, faire lobjet dobservations de la juridiction financière.

Lexamen de gestion nest pas un acte juridictionnel, mais un contrôle administratif puisquil naboutit pas à un acte juridictionnel. Le « rapport dobservations » est en effet un document administratif. Toutefois, les observations formulées, même définitives, par une CRC concernant la gestion dune collectivité territoriale, ne présentent pas le caractère de décisions susceptibles de faire lobjet dun recours devant le juge administratif.

Une observation peut être rectifiée par la CRC à la demande dune personne explicitement mise en cause. Le refus de rectification peut être contesté devant le juge administratif. Ainsi, le juge pourrait sanctionner, dans le cadre dun contrôle minimum, le non-respect des droits de la défense, en particulier le non-respect de la procédure contradictoire (légalité externe) ou linexactitude matérielle des faits (légalité interne). En revanche, lerreur manifeste dappréciation semble toujours écartée.

Bien que ces observations émises ne contraignent pas directement les personnes intéressés, elles peuvent influencer lexercice de leur mandat par les ordonnateurs ou affecter le déroulement des travaux dune assemblée délibérante. En effet, malgré la liberté des exécutifs de réagir aux observations de gestion comme ils l’entendent, la publicité qui leur est automatiquement attachée et les obligations de suivi qui en découlent exercent une pression indirecte sur ces derniers.

Dans ce contexte, l’examen de gestion mené par une CRTC joue un rôle crucial dans la détection de potentiels risques de gestion au sein d’une collectivité territoriale. La nature publique des observations définitives émises à l’issue d’une procédure de contrôle de cette nature, met en lumière les dysfonctionnements et peut engendrer un risque politique plus ou moins grave.

Infractions financières et leurs sanctions

Le régime unifié de responsabilité financière des gestionnaires publics (comptables et ordonnateurs) prévoit des infractions définies par le code des juridictions financières (articles L131-9 à L131-15). En premier ressort, ces infractions relèvent de la compétence de la Cour des comptes, au second degré, elle relève de la cour d’appel financière.

Sur les responsables au sein des collectivités, établissements et organismes publics, les infractions suivantes sont sanctionnables :

        • une faute grave ayant causé un préjudice financier significatif due à une violation des règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses ou à la gestion des biens. Le caractère significatif du préjudice financier est apprécié en tenant compte de son montant au regard du budget de l’entité ou du service relevant de la responsabilité du justiciable ;
        • pour une personne occupant un emploi de direction, des agissements, manifestement contraires aux intérêts de l’organisme public, des carences graves dans les contrôles requis ou des omissions ou négligences répétées dans l’exercice de ses fonctions de direction ;
        • des actes ayant pour conséquence de contrecarrer une procédure de mandatement d’office ;
        • l’exercice de fonctions ou d’attributions en violation des obligations déontologiques, motivé par une intérêt personnel direct ou indirect, aboutissant à un avantage injustifié, financier ou en nature, à une personne morale, à une tierce personne, ou au responsable lui-même,,
        • l’engagement d’une dépense, sans respecter les règles de contrôle budgétaire ou sans en avoir le pouvoir ou sans délégation appropriée ;
        • des actions menant à la condamnation d’une personne morale de droit public ou d’un organisme de droit privé gérant un service public, à une astreinte en raison de l’inexécution totale ou partielle ou de l’exécution tardive d’une décision de justice ; 
        • le non-respect des dispositions relatives aux astreintes imposées en matière administrative et l’exécution des jugements par les personnes morales de droit public.
Les devoirs d’exemplarité des employeurs publics locaux

Dans le domaine de la gestion publique locale, les employeurs publics sont confrontés à de multiples exigences dexemplarité dans des domaines variés, notamment : la prise en compte de lintérêt général, le libre accès et l’égalité devant le service public, le respect des principes de laïcité, la qualité des relations avec les usagers, les obligations de transparence, de concertation, consultation et débat, l’égalité professionnelle entre femmes et hommes, la prise en compte des risques liés à l’hygiène, la sécurité et les conditions de travail, la lutte contre l’illettrisme, l’accueil des personnes en situation de handicap, le dialogue social, ainsi que les relations partenariales entre institutions territoriales.

Ces exigences, souvent ancrées dans des principes de droit, des dispositions législatives ou réglementaires, peuvent faire l’objet de recours devant les tribunaux administratifs.

Obligations liées à la communication des collectivités territoriales et des candidats en période électorale

La communication des candidats aux élections relève de règles qui constituent autant dexigences de transparence, d’égalité économique entre candidats et préserve de certains « mélanges des genres » entre les candidats et les exécutifs de collectivités territoriales.

Dans le respect des règles de financement de campagnes électorales, différentes formes de communication politique sont autorisées, imputables au compte de campagne de chaque candidat : distribution de tracts, affichage, gestion dun journal de campagne, publication dun ouvrage, organisation de réunions électorales et de banquets républicains, recours aux sondages, utilisation du téléphone, intervention des candidats dans les médias, recours aux réseaux sociaux et Internet, utilisation de fichiers sous certaines conditions, recours à la publicité commerciale dans des limites encadrées, vente dobjets publicitaires, offre de cadeaux.

En revanche, dautres formes de communication sont interdites : lusage des numéros dappel téléphonique ou télématique gratuit, laffichage électoral sauvage, lutilisation à des fins de propagande électorale de tous procédés de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tous moyens de communication audiovisuelle, la distribution de lettres et tracts en dehors des conditions réglementaires fixées par le code électoral.

Le non-respect de ces prescriptions en matière de communication en période électorale peut conduire à des sanctions qui sont celles relatives au financement de la vie politique :

        • le dépassement du plafond des dépenses électorales autorisé et le financement direct ou sous forme dun avantage en nature dune action de communication par une personne morale autre quun parti ou groupement politique peut donner lieu à des sanctions électorales : inéligibilité et annulation de l’élection ;
        • outre les sanctions financières pouvant être prononcées par le juge pénal, le candidat peut perdre le remboursement forfaitaire prévu par le code électoral ou bien, en cas de dépassement du plafond des dépenses électorales, la CNCCFP peut fixer une amende égale au montant du dépassement.

À ces exigences auxquelles sont soumis les candidats sajoutent des règles de communication institutionnelle des collectivités gérées par les élus candidats qui pourraient être tentés dutiliser les moyens publics mis à leur disposition pour favoriser leur réélection : réceptions, manifestations et commémorations, inaugurations, bulletins et magazines institutionnels des collectivités, émissions télévisées financées par les collectivités, affichage institutionnel, cartons dinvitation, bilans de mandats, éditoriaux, vœux annuels, utilisation de la photothèque de la collectivité, réalisation de sondages à linitiative dune collectivité, organisation de référendums locaux en période électorale, numéros verts, sites Internet des collectivités, ouvrages concernant les collectivités, utilisation des fichiers des collectivités, des moyens humains et matériels de la collectivité ou de ses satellites, etc.

Les deux principes essentiels sont les suivants :

        • les personnes morales, à lexception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale dun candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux habituellement pratiqués ;
        • à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion dune collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin.

Le droit à lexpression des membres de lopposition ne peut contrevenir aux dispositions ci-avant mentionnées.

Ceci nécessite que les candidats placés dans cette situation opèrent la distinction entre ce qui relève de la campagne électorale dont le coût doit être retracé dans le compte de campagne, et ce qui appartient à la communication de linstitution. Les principaux critères de cette distinction sont : le principe de lobjectivité et de la neutralité, le principe de lantériorité, le principe de la régularité, le principe de lidentité de la forme du support.

Pour les responsables politiques qui commettent des infractions pénales, linéligibilité constitue une sanction particulièrement dissuasive. Cest notamment le cas pour les auteurs de manquements à la probité qui ont démontré quils représentaient un danger pour le bon fonctionnement du monde économique comme pour ladministration.

Le risque de privation du droit d’être élu peut résulter de deux hypothèses :

        • en matière électorale, le juge peut prononcer jusqu’à trois ans dinéligibilité en cas de non-respect par un candidat des obligations relatives au financement des campagnes électorales ou de manœuvres frauduleuses portant atteinte à la sincérité du scrutin, et jusqu’à un an dinéligibilité en cas de manquement aux obligations déclaratives prévues par les lois sur la transparence ;
        • une peine dun an dinéligibilité est également applicable aux élus locaux ayant refusé dexercer les fonctions confiées par la loi ;
        • en matière pénale, linéligibilité est une peine complémentaire facultative qui, aux termes du Code pénal, ne peut, sauf disposition contraire, résulter de plein droit dune condamnation pénale. Elle est susceptible, à ce titre, de compléter une condamnation pénale et ne peut excéder dix ans pour un crime et cinq ans pour un délit. La liste des infractions concernées est large et couvre notamment lensemble du champ des infractions à la probité publique. De même, une inéligibilité pouvant atteindre dix ans peut être prononcée en matière fiscale pour des faits de fraude fiscale, de manœuvre en matière fiscale, dabsence de déclaration de revenus et de fraude dans les déclarations effectuées au titre de la publicité foncière.

Les peines dinéligibilité sappliquent de manière spécifique pour les élus. Elles peuvent être prononcées pour une durée de dix ans au plus à lencontre dune personne exerçant un mandat électif public au moment des faits.

Obligations liées aux règles de financement des campagnes électorales

Chaque candidat dans le cadre dun scrutin uninominal, ou tête de liste dans le cadre dun scrutin plurinominal, est tenu d’établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, lensemble des recettes perçues, et, selon leur nature, lensemble des dépenses effectuées en vue de l’élection dans lannée qui précède le mois du scrutin. Cette obligation ne concerne pas les élections sénatoriales ni celles dans les communes de moins de 9 000 habitants. Ce compte de campagne doit être déposé auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).

Diverses prescriptions, imposées par le législateur, pèsent sur les opérations de recettes et dépenses exécutées : lorigine des recettes autorisées, la nature des dépenses électorales, la désignation dun mandataire financier prévu pour chacun des candidats concernés par lobligation de tenue dun compte de campagne ainsi que les formalités auxquelles il doit satisfaire, les montants plafonds de dépenses, le plafonnement des contributions des personnes physiques, linterdiction du financement par des personnes morales et les modalités de contributions personnelles des candidats et les apports des partis politiques. En cas de non-respect de ces règles de financement des campagnes électorales, le compte de campagne du candidat peut être rejeté.

Cette situation a plusieurs incidences :

        • le juge de l’élection prononce l’éligibilité du candidat pendant un an et, sil a été proclamé élu, lannulation de son élection ou sa démission doffice ;
        • la perte du remboursement forfaitaire des dépenses électorales auquel a droit tout candidat ou liste ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au premier tour de l’élection ;
        • en cas de dépassement du plafond des dépenses électorales, la CNCCFP peut fixer une amende égale au montant du dépassement ; 
        • le juge judiciaire peut prononcer des peines (amende de 3 750 euros assortie ou non dune peine demprisonnement dun an) pour les candidats nayant pas respecté les modalités d’établissement du compte de campagne.