Depuis les années 80, l’objectif de stimuler la démocratie locale par la décentralisation a partiellement échoué, laissant un espace démocratique local « essoufflé ». Bien que des fondations aient été posées pour renforcer les pouvoirs locaux et la participation citoyenne, la mise en œuvre s’est concentrée sur la réorganisation institutionnelle au détriment de la consultation des citoyens. Malgré certaines avancées législatives, l’esprit de citoyenneté reste faible, comme en témoigne l’augmentation de l’abstention aux élections locales. L’intérêt général est contesté, confronté à un individualisme croissant et à des doutes sur la capacité de l’État à prévaloir dans l’intérêt de tous.
La crise de la citoyenneté provoque un malaise, apparu depuis la fin des années quatre-vingt : l’essoufflement de l’idée de démocratie locale que la décentralisation était censée stimuler.
L’objectif inachevé d’une participation active des citoyens à la vie locale
Les lois de décentralisation de 1982 et 1983 ont posé les fondations pour l’émergence de véritables pouvoirs locaux, visant indirectement à accorder une place plus centrale aux citoyens. Ceci est affirmé dans l’article L 1111-2 du code général des collectivités territoriales :
« Les communes, les départements et les régions constituent le cadre institutionnel de la participation des citoyens à la vie locale et garantissent l’expression de sa diversité. »
Cependant, durant les premières années de la décentralisation, l’accent a été mis sur la réorganisation des institutions locales, les transferts de compétences et la création d’une fonction publique territoriale, négligeant ainsi la mise en place de mécanismes de participation, d’information ou de consultation des citoyens.
Ce sont d’autres textes législatifs, avant ou après les lois de décentralisation qui ont introduit des dispositions concernant directement les droits des citoyens dans leurs relations avec les institutions locales, notamment en matière d’urbanisme, d’environnement ou d’action sociale. Les lois du 12 avril 2000 et du 28 février 2002 ont notamment apporté des contributions significatives à la démocratie locale mais n’ont pas pour autant renforcé l’esprit de citoyenneté, comme en témoigne le doublement du taux d’abstention aux élections locales.
Les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) ont exercé une pression bénéfique pendant ces quarante dernières années pour garantir l’information des citoyens, non seulement dans le domaine d’action direct des collectivités territoriales mais aussi dans celui de leurs organismes annexes ou associés tel que les établissements publics, offices publics d’HLM, sociétés d’économie mixte et associations. Néanmoins, il existe peu d’observations de la part des magistrats financiers concernant les manquements en matière de concertation ou de consultation des citoyens, et aucune recommandation en ce sens.
Aujourd’hui, de nombreux individus attendent uniquement des élus la défense de leurs intérêts privés, manifestant un égocentrisme et nouant des relations intéressées voire « vénales » avec les élus locaux.
Il en résulte une démocratie locale « essoufflée ».
L’ambition oubliée de démocratie locale
De nos jours, les thèmes de « proximité » et de « participation » remplacent celui de la démocratie locale. Or, ils tendent trop souvent à occulter la réflexion sur la démocratie en tant que telle.
La phrase peut être rendue plus claire et fluide avec quelques ajustements :
L’enjeu de la démocratie locale réside dans la capacité des citoyens, des élus et des fonctionnaires à transcender leurs intérêts personnels ou carriéristes afin de privilégier l’intérêt général, cela à travers un dialogue authentique.
Toutefois, la notion d’intérêt général fait l’objet de nombreuses contestations. En effet, deux conceptions de l’intérêt général s’affrontent. L’une le perçoit comme la somme des intérêts privés réduisant l’Etat au rôle protecteur des libertés. L’autre, plus volontariste, voit dans l’intérêt général le dépassement des intérêts particuliers.
La croyance dans l’intérêt général recule dans un contexte de repli sur les intérêts personnels, de valorisation des comportements individualistes et de désaffection pour la défense des idéaux collectifs.
Le phénomène est exacerbé lorsque la légitimité de l’Etat est remise en cause et que des doutes surgissent sur sa capacité à faire prévaloir l’intérêt général. Ainsi, l’Etat, conçu comme garant de l’unité de la volonté collective et de l’intérêt général face à la diversité des intérêts de la société civile, peine à susciter l’adhésion des citoyens.
Recréer de la confiance, du sens civique et des liens sociaux
Pour sortir des crises qui couvent, de celles qui explosent de temps à autre, des réponses profondes sont nécessaires qui recréent de la confiance, du sens civique et des liens sociaux. C’est la survie de notre contrat social qui est en jeu.
Ce profond malaise ne se résoudra pas facilement en quelques mesures. Il appelle des traitements de fond et un temps de cicatrisation Plusieurs initiatives doivent être prises à cette fin. Nous en citerons quelques-unes, d’ordres divers, à titre d’illustration de notre approche :