Modes de gestion des services publics

Les services publics peuvent se définir comme des activités dintérêt général, assurées par des personnes publiques au moyen de procédés exorbitants du droit commun de nature à garantir une finalité publique.

Contrairement à une idée reçue, les collectivités territoriales et leurs groupements disposent de la liberté de choisir parmi divers modes de gestion pour exploiter leurs services publics. Cette faculté découle du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Ces dernières peuvent donc décider soit de gérer directement le service, soit den confier la gestion à un tiers par le biais d’une convention de délégation de service public.

Affirmation de la notion de service public

Le service public est la notion centrale et fondatrice du droit administratif et le critère de la compétence du juge administratif. Elle peut se définir comme une activité dintérêt général, assurée par une personne publique au moyen de procédés exorbitants du droit commun de nature à garantir la finalité publique.

Cette définition renvoie à trois éléments :

  • un élément organique : un ensemble de moyens quune personne publique affecte à une tâche ;
  • un élément matériel : des activités du type prestation qui sont développées dans un but dintérêt général ;
  • un élément juridique : lexistence dun régime de droit public.

Ces différents critères ont été remis en cause à une époque ancienne par la jurisprudence du Conseil d’État, et à une époque plus récente, par les développements du droit européen.

Le Conseil d’État a dégagé trois critères pour qualifier les services publics et permettre de distinguer les services publics administratifs de ceux industriels et commerciaux :

  • lobjet du service public ;
  • lorigine des ressources ;
  • les modalités de fonctionnement.

Dans un premier temps, le Conseil d’État a admis que des personnes privées puissent être investies de prérogatives de puissance publique, en loccurrence le droit dexpropriation. Ainsi, le Conseil d’État a amorcé la dissociation entre le service public entendu comme une institution et le service public entendu comme une mission. Dans ces conditions il a pu admettre quelques années plus tard quune personne privée puisse, en dehors de tout contrat de concession, par la simple soumission partielle à un régime de droit public, gérer un service public. Dans la foulée de cette jurisprudence, de nombreuses catégories de personnes privées se sont vues reconnaître la même possibilité.

Ainsi, la notion de service public est perçue tout autant selon une approche fonctionnelle quorganique.

Articulation entre la notion de service public et le droit européen

Le droit européen ignore la notion de service public. Il ne connaît que des services dintérêt général (SIG) et des services dintérêt économique général (SIEG).

Les SIG (école, hôpital) désignent des services marchands et non marchands que les États considèrent comme étant dintérêt général et quils soumettent à des obligations spécifiques de service public. Selon la Commission, les services dintérêt général peuvent être considérés comme des « activités de service, marchands ou non, considérées dintérêt général par les autorités publiques et soumises pour cette raison à des obligations de service public ».

Les SIEG sont mentionnés dans les traités européens, sans toutefois être définis. Ils désignent les services de nature économique soumis à ces obligations de service public (transports, services postaux, énergie, communications).

Les SIEG au contraire des SIG sont soumis aux règles de la concurrence sans toutefois quelles puissent les empêcher daccomplir leur mission.

Modes de gestion des services publics locaux

Contrairement à une idée reçue, les collectivités territoriales et leurs groupements disposent de la liberté du choix du mode de gestion pour exploiter leurs services publics. Cette faculté découle du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Ces dernières peuvent donc décider soit de gérer directement le service, soit den confier la gestion à un tiers par le biais dune convention de délégation de service public.

Cependant, cette liberté comporte des limites :

  • la loi ou la jurisprudence peut imposer quune activité soit gérée directement par la collectivité compétente, sans pouvoir être déléguée : compétences exercées au nom de l’État (état civil, élections, recensement, etc.), activités relevant directement du domaine régalien (police, sécurité, hygiène, etc.), réglementation et organisation interne des services. La limite peut parfois passer au sein dune même activité : ainsi, concernant les cantines scolaires, une commune peut confier à une entreprise privée la fourniture ou la préparation des repas, mais la surveillance des élèves est une mission qui relève du service public de lenseignement public et qui ne peut donc être déléguée ;
  • une collectivité ne peut créer un établissement public que si la loi le prévoit, ce qui est le cas pour les CCAS, les centres sociaux et médico-sociaux, les caisses des écoles, les caisses de crédit municipal, les établissements publics de coopération culturelle, les services départementaux dincendie et de secours, les agences départementales et, bien sûr, les diverses catégories d’établissements publics de coopération intercommunale, interdépartementale ou interrégionale. Aucun autre établissement public ne peut être créé par une commune.

Les services publics locaux peuvent donc être gérés selon plusieurs modalités, choisies par lassemblée délibérante, que lon peut classer en deux grandes catégories :

  • les modes intégrés de gestion, dans lesquels lactivité reste assurée par une personne publique dans le cadre du droit administratif ;
  • les modes externalisés de gestion, dans lesquels lactivité est confiée à une personne privée, sous le regard de la puissance publique à lorigine de cette externalisation.

Modes intégrés de gestion des services publics locaux

Il existe plusieurs modes de gestion intégrés, qui peuvent être classés en fonction de leur degré croissant d’éloignement de la collectivité territoriale qui en a la charge : régie directe ; régie autonome ; régie personnalisée ; « quasi-régie » ; coopération publique.

Par gestion directe, on entend un mode de gestion par lequel la collectivité locale gère directement le service. Cela se matérialise par le recours à une régie.

La régie autonome constitue un mode de gestion qui permet disoler au sein des services communaux une activité particulière, en lui donnant une certaine autonomie de gestion, sans pour autant créer une personne morale distincte de la commune.

La régie personnalisée se définit quant à elle comme le mode de gestion à travers une personne morale publique distincte de la commune, à savoir un établissement public.

La « quasi-régie » (aussi désignée sous le terme « in house ») concerne une personne morale, distincte formellement de la collectivité, mais sur laquelle cette dernière exerce un contrôle comparable à celui quelle exerce sur ses propres services et qui réalise lessentiel de ses activités pour elle.

La coopération publique désigne le contrat par lequel plusieurs personnes publiques coopèrent pour lorganisation dune mission de service public commune.

Modes externalisés de gestion des services publics locaux

Une collectivité peut décider de ne plus gérer elle-même un service public (même si elle en garde toujours le contrôle), mais de confier cette gestion à une autre personne, en général une personne privée, par un contrat :

  • ce contrat devra obligatoirement être précédé dune procédure de mise en concurrence ;
  • en fonction du mode de rémunération prévu pour le co-contractant, ce contrat sera un marché public, une délégation de service public ou un contrat de partenariat.

La nature juridique du co-contractant (entreprise privée, société d’économie mixte, association, établissement public, etc.) ne rentre pas en ligne de compte.

Lorsquune personne privée exerce, sous sa responsabilité, une activité dont elle a pris linitiative et sans quune personne publique en détermine le contenu, elle ne peut être regardée comme exerçant une mission de service public. Son activité peut cependant se voir reconnaître un caractère de service public, alors même quelle na fait lobjet daucun contrat de délégation de service public procédant à sa dévolution, si une personne publique, en raison de lintérêt général qui sy attache et de limportance quelle revêt à ses yeux :

  • exerce un droit de regard sur son organisation ;
  • et, le cas échéant, lui accorde des financements, dès lors quaucune règle ni aucun principe ny font obstacle.